le 13 décembre 2021, M. Jean-Marc DESPREZ, IGESR de S2I chargé de l’enseignement de la Technologie au collège, en remplacement de M. Samuel VIOLIN, en retraite, m’a contacté en vue d’une entrevue par visio avec des membres du conseil d’administration de Pagestec.
Ci-dessous le courriel instaurant le cadre de cette entrevue :
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L’inspection générale, à la demande de M le Ministre de l’Education nationale, du sport et de la recherche, conduit différents entretiens au sujet de la pratique informatique, aux cycles 3 et 4, et pour les enseignements de technologie et de mathématiques. Il s’agit d’établir un bilan de la pratique informatique.
- Quelles pratiques dans les classes (horaire, pratiques, activités, évaluation, …) ?
- Quel engagement des filles et des garçons dans les activités proposées ?
- Quel travail commun entre les 2 disciplines et enseignements, mathématiques et technologie ?
- Quelle contribution à la pensée informatique ?
La pensée informatique se distingue de la littératie numérique
Je vous communique l’enquête de la DEEP
L’enquête de la DEPP en 2018 analyse et compare le score des élèves de 4e en pensée informatique. « La pensée informatique est le type de raisonnement utilisé lors de la programmation sur un ordinateur ou du développement d’une application pour un autre type d’appareil numérique. Dans l’enquête ICILS 2018, la pensée informatique est définie comme la capacité d’un individu à identifier les problèmes du monde réel qui sont appropriés pour une formulation informatique, ainsi qu’à évaluer et à développer des solutions algorithmiques à ces problèmes afin de les mettre en œuvre à l’aide d’un ordinateur. »
Selon le cadre de l’évaluation, la pensée informatique comprend deux sous-dimensions :
- la conceptualisation des problèmes et la mise en œuvre de solutions (création, mise en œuvre
- l’évaluation de solutions informatiques à des problèmes.
Les différentes ressources existantes s’accordent à définir la pensée informatique comme suit : « La pensée informatique est un processus intellectuel visant à définir les problèmes et les résoudre de manière à ce qu’ils puissent être pris en charge par un dispositif de traitement automatisé. »
Elle s’appuie sur le développement des compétences suivantes :
- décomposition : analyser un problème complexe, le découper en sous-problèmes, en sous-tâches ;
- reconnaissance de schéma : reconnaître des schémas, des configurations, des invariants,des structures récurrentes, mettre en évidence des interactions ;
- généralisation et abstraction : repérer les enchaînements logiques et les traduire en instructions conditionnelles, traduire les schémas récurrents en boucles, concevoir des méthodes liées à des objets qui traduisent le comportement attendu ;
- conception d’algorithme : écrire des solutions modulaires à un problème donné, réutiliser des algorithmes déjà programmés, programmer des instructions déclenchées par des événements, concevoir des algorithmes se déroulant en parallèle.
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L’enquête de la DEPP est consultable en annexe ci-dessous.
La visio-conférence s’est déroulée le lundi 3 janvier, de 17h à 18h30 environ. J’avais demandé à Lucie Ferreira-Loureiro, Rachelle Riouah, Sébatien Canet, membres du CA de Pagestec et Frédéric Picart, adhérent, de se joindre à moi. Frédéric a été choisi pour ses nombreux travaux dans le domaine de la programmation, régulièrement partagés sur nos listes et parce qu’il a mené des projets avec Sébastien. N’ayant pas reçu à temps les modalités de connexion, Rachelle n’y a finalement pas participé et Lucie, après quelques déboires de connexion, a pu suivre une partie de l’entretien via son smartphone, mais sans intervenir.
Face à nous, M. Desprez était accompagné de deux IGESR de mathématiques : M. Jean-Marie CHESNEAUX et Mme Claudine PICARONNY. En tout, cinq IGESR planchent sur cette mission d’étude de la pratique informatique en technologie et en mathématiques aux cycles 3 et 4. Les IGESR ne nous ont pas donné les objectifs ultimes de cette mission. Une réforme des programmes des collèges est sans doute dans les cartons, mais il y a des élections prochainement...
Nous avons pu débattre sur les 4 thématiques proposées : "Quelles pratiques dans les classes (horaire, pratiques, activités, évaluation, …) ?" ; "Quel engagement des filles et des garçons dans les activités proposées ?" ; "Quel travail commun entre les 2 disciplines et enseignements, mathématiques et technologie ?" ; "Quelle contribution à la pensée informatique ?"
Nous avons parlé des pratiques, des projets, des nôtres et de ceux circulant sur nos listes de discussion. Sébastien a présenté une progression par niveau de l’enseignement informatique qu’il avait mise au point pour son groupe de formateur académiques. M. Desprez semble avoir été séduit et lui a demandé de la lui transmettre.
Nous en avons profité pour dénoncer le manque de moyens dans certaines académies, mais aussi le manque de professeurs certifiés titulaires, l’appel à contractuels non ou insuffisamment formés, l’offre de formation continue insuffisante face aux évolutions des contenus , le manque de précison dans l’intitulé des compétences, entrainant des disparités dans les pratiques sur le terrain (certains projets parfois trop ambitieux, d’autres trop timorés, les deux pouvant entrainer un rejet chez cetains élèves) et ne donnant pas de curseur précis quand à l’approfondissement sur les 4 piliers de l’informatique attendus en fin de cycle (séquence - condition - boucle - variable).
Nous avons également exposé notre ressenti sur les pratiques de la programmation chez nos collègues de mathématiques : le choix quasi exclusif de Scratch qui est un logiciel à la base destiné à créer rapidement des jeux, donc limité dans le domaine de l’algorithmique, le manque de formation de nos collègues qui ont souvent appris sur le tas entrainant parfois des pratiques peu orthodoxes, mais surtout limitant la création des élèves en leur imposant une solution type et une seule quand le problème peut en admettre plusieurs. Leur manque de maîtrise les empêchent de dévier du manuel scolaire.
Nous avons comparé les usages : en technologie, les programmations sont en général orientées vers les objets, proches du réel. En mathématiques, on programme pour programmer, souvent pour consolider des notions de géométrie (le chat de Scratch dessine des figures) ou de calculs itératifs (programmation d’un tableur-grapheur avec Scratch). En technologie, nous présentons et utilisons plusieurs outils (algorigrammes, algorithmes, organigrammes, etc) et plusieurs logiciels (mBlock, Ardublock, Blockly - for Picaxe, @rduino, Algorea, etc -, Logicator, Robopro, etc), voire plusieurs technologies, ouvrant ainsi l’esprit de nos élèves à plusieurs pratiques.
Concernant la collaboration entre enseigants de technologie et de mathématiques, elle s’avère souvent compliquée, les collègues de mathématiques étant par trop attachés au timing de leurs programmes, leur laissant peu de temps et de liberté pour développer des projets communs. Bien souvent ils sont mal à l’aise avec la transposition de la programmation au monde réel, que 2 moteurs n’aillent pas à la même vitesse, que des capteurs donnent des valeurs oscillantes, etc, sont autant de problèmes dans leur pratique.
Nous avons par ailleurs soulevé l’intérêt de travailler en groupes à effectifs réduits dans ce domaine et dénoncé le fait que la mise en place de tels groupes n’était pas une évidence malgré la circulaire du 2 juillet 2015 relative à l’organisation des enseignements au collège.
Nous avons émis nos craintes de voir l’enseignement technologique glisser vers toujours plus de programmation et de robotique, au détriment des activités de production manuelles, pour nous essentielles pour une catégorie d’élèves moins enclins à des poursuites d’études en lycée général et technologique, mais aussi dans la formation des citoyens et des consommateurs de demain.
Enfin, nous avons dénoncé les sujets du DNB limitant l’évaluation des compétences numériques à un algorigramme et un extrait de programme Scratch très simples à compléter, sur feuille, tout aussi hors propos que les tableurs à commenter et compléter sur feuille également. Les IGESR semblaient de notre avis, mais ne maîtrisent pas toute l’organisation de cet examen...
M. Desprez nous a chaleureusement remercié de notre paticipation. Il a exprimé son attachement aux associations de professeurs qui défendent leur discipline et instaurent une entraide et un soutien aux collègues. Il nous a promis de revenir vers nous en cas de refonte des programmes de technologie et s’est dit ouvert à toute discussion future.
Xavier Herbaux
Président de Pagestec
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